Jonas MOULENDA

C’EST vraiment un pays des paradoxes. Avec un taux de croissance de 2,5 %, le Gabon détient l’un des PIB les plus forts d’Afrique, 7 179,34 USD par habitant, soit le 65è rang mondial selon le Programmes des Nations unies pour le développement (PNUD). Malheureusement, ces données contrastent sévèrement avec le niveau de pauvreté que la Banque Mondiale chiffre à 83 %.

A Libreville, la capitale du pays, cette pauvreté se développe quotidiennement dans les quartiers misérablement, communément appelés ‘’Mapanes’’. Ces ghettos gabonais regorgent presque les trois-quarts de la population de la ville. Des Etats-Unis d’Akébé à Rio, en passant par Cosmopark, Dragon, Kinguélé, Belles-Peintures, Venez-voir, Atsibe-Atos, Atong-Abè, Sotéga, Derrière-la-prison, la vie des riverains reste très difficile au quotidien.
Dans ces quartiers misérables, on trouve des maisons le plus souvent construite en bois scié. Serrées les unes contre les autres. Il n’y a presqu’aucune voix d’accès pour les pompiers en cas de sinistre. Pas d’espace de jeux, pas de cour de récréation pour les jeunes ! Les distractions saines sont rares et les mœurs légères en sont une des conséquences.

Viols, prostitution, alcoolisme et drogue y sont légion. Même des mineurs sniffent du chanvre sous le regard impuissant des adultes. Ce sont des zones de non-droit. La police ne s’y rend que rarement. Les agressions et les braquages en font de véritables pandémoniums.
Dans ruelles sordides de ces bidonvilles, des enfants en guenilles baguenaudent à la recherche de quoi mettre sous la dent. Leurs parents sont exclus de la manne pétrolière et vivent dans l’extrême pauvreté. Le pays est riche, mais seul un petit clan mafieux en tire profit. Combien de temps les exclus du miracle vont-ils regarder une pègre capter à son seul profit les pétrodollars?

ECART ENTRE LES RICHES ET LES PAUVRES. Au premier contact des Mapanes, la misère se lit des latrines qui attendent souvent les pluies diluviennes pour être vidangées quand le ruisseau Batavéa qui serpente la ville ne le peut. Dans ce paradis à l’envers, l’alimentation est riche en riz et en congelés ; c’est le repas quotidien de nombre de familles démunies de la ville, voire du pays.

Les habitants des Mapanes adorent se fourvoyer dans le luxe. Le « ventilo » est l’appareil le plus prisé les riverains, la télé aussi. Le tapis ou la moquette ne manquent jamais, même dans les masures. Mais à l’opposé de ce décorum sombre, il y a la Sablière, le quartier des riches où vivent Ali Bongo et sa famille.

Dans une société stratifiée, ils connaissent une prospérité insolente, tandis que les zones pauvres s’enlisent. La situation rappelle celle du XIXe siècle, quand les « classes dangereuses » étaient tenues à l’écart et que les nantis pensaient que charité et philanthropie permettraient de perpétuer l’ordre des choses.

La carte postale est belle. Le front de mer est en coquet. Les puissants véhicules 4X4 longent la longue avenue, bordée de châteaux. Les restaurants chics et les boutiques de luxe attirent une élite assise sur une montagne d’argent et les nombreuses personnes travaillant dans l’administration publique.

Derrière des barrières surélevées, ornées de fleurs, une forêt de maisons dont beaucoup traduisent la prospérité de ses habitants. Oui, la carte postale est belle ! Elle fait penser à la Riviera française, à la Californie ou à Copacabana. La réalité est beaucoup glamour. Loin de tous les flonflons des quartiers populaires, les habitants de la Sablière se la coulent douce.

Malgré l’abondance relative du Gabon des ressources naturelles, le fossé entre les riches et les pauvres se creuse dans ce pays riche en pétrole. Les riches représentent jusqu’à 20 % tandis que les pauvres représentent 80 % de 1,8 millions d’habitants du Gabon. Le Gabonais moyen vit avec 3 $ à 4 $ par jour, tandis que les plus pauvres vivotent sur seulement 1,80 $ par jour, selon les estimations des organismes spécialisés. Les données sociales sur le Gabon montrent que le pays affiche un niveau de pauvreté de plus de 60 % de la population, pour un taux de chômage de 31%. C’est le paradis à l’envers, vraiment !