Une pègre aux nombreuses ramifications délivre frauduleusement permis de conduire international, autorisations de circuler et licences de transports terrestres aux demandeurs, en échange des sommes astronomiques. Tous ceux qui osent s’attaquer à ce vaste réseau mafieux en paient parfois un lourd tribut. Enquête sur les canailles du ministère de Transport. 

Jonas MOULENDA

C’EST une fable digne de Pagnol qui pourrait se jouer un jour devant un tribunal correctionnel sur fond de trafics en tout genre. Les transporteurs de grumes détenteurs des autorisations de circuler les week-ends sur les routes du Gabon les obtiennent, moyennant une somme d’un million de franc CFA au cabinet du ministre de Transport, Brice Paillat.

C’est d’ailleurs lui-même qui signe ces documents, en lieu et place du directeur général des transports terrestres, manifestement résigné. Selon une source proche du parquet de Libreville, sa pègre délivrerait d’autres documents tels que les permis internationaux et toutes les licences de transports terrestres, contre des espèces sonnantes et trébuchantes.

De fait, l’obtention de tous ces documents est devenue une démarche des plus aisées au Gabon depuis que ce mafioso, soutenu par le sulfureux Ian Ghislain Ngoulou, est arrivé à la tête du ministère de Transport. Il s’est entouré d’une bande de copains qui jouent le rôle de démarcheurs auprès des demandeurs.

 D’après nos sources, une démarche clandestine permet à de nombreux Gabonais et étrangers d’acquérir le permis de conduire international, moyennant une somme de 700 000 franc CFA. Les clients paient rubis sur l’ongle ladite somme auprès des collaborateurs de Brice Paillat et non au Trésor public. Le directeur technique de cette pègre ne serait autre que le syndicaliste Ghislain Malanda, homme-lige de Brice Paillat.

Ghislain Malanda, le directeur technique de la pègre de Brice Paillat.

Affecté comme chef de service affecté au service météo, il passe plus de temps à arpenter les couloirs de la direction générale des transports terrestres (DGTT) et du centre national de la carte grise pour glisser des dossiers collectés auprès des clients disséminés à travers le pays. À la direction générale du permis de conduire, il buterait sur les garde-fous mis par le patron de cette entité,  Oscar Mapangou avec lequel il est en rupture de ban.

MAFIOSOS. Contrarié, Malanda l’avait d’ailleurs agressé physiquement sous les cameras d’une chaîne de télévision qu’il avait emmenée sur place, en compagnie de sa cohorte de syndiqués bien connus. Il s’agit, a-t-on appris, d’Espingole, président du Syndicat national de la direction générale des transports terrestres ainsi que de ses acolytes Ike Mbongo Mavoungou, Obenance Boussamba et Roland Ndong Mba.

Tous ces mafiosos continuent de vouer une haine viscérale à Oscar Mapangou. Son crime de lèse-majesté aura d’avoir pris attache avec les services de l’Aninf pour sécuriser le fichier national du permis de conduire que la mafia du ministère de Transport veut continuer de contrôler afin d’en faire un autre gisement financier.

Résolu à se débarrasser de cet empêcheur de tourner en rond, Brice Paillat et son mentor Ian Ghislain Ngoulou ont commandité un audit par l’autorité nationale de vérification et d’audit (anavea) en novembre 2021. Fait curieux, cet audit auquel personne ne s’y oppose, ne concerne que l’entité gérée par Mapangou. Or, le permis de conduire n’est pas le seul document de transport délivré.

Les transporteurs de grumes paient chacun une somme d’un million de F CFA pour circuler le week-end.

Le fameux audit aux allures d’une trappe a royalement esquivé la direction générale de transport terrestre (DGTT) qui délivre les cartes grises, les autorisations de circuler, les permis internationaux et toutes les licences de transports terrestres. De même, l’Anevea n’a pas lorgné vers la direction de la marine marchande et la direction de transport routier (DTR). La raison est simple : les responsables de ces entités sont contributeurs de la pègre de Brice Paillat.

 Oscar Mapangou se montrant réfractaire à la livraison des sacs d’argent au cabinet de ministre, il encourt donc le risque d’être éjecté de son fauteuil. Pourtant, reconnaît-on, il a apporté de nombreuses réformes pour que les Gabonais soient mieux servis pour l’obtention de leur permis de conduire. Mais cet empêcheur de tourner en rond est désormais dans le collimateur de Brice Paillat qui voudrait le remplacer par une personne plus malléable.

De toute évidence, les canailles du ministère de Transport n’ont pas apprécié les mesures prises par Mapangou pour nettoyer et sécuriser le fichier du permis de conduire. Cette réforme salutaire réduit leurs marges de manoeuvre. Malanda et ses acolytes seraient très endettés, après avoir extorqué de grosses sommes d’argent aux candidats à l’obtention illégale des permis de conduire. Leur colère résulterait du fait qu’ Oscar Mapangou refuse de valider leurs dossiers frauduleux.  Brice Paillat leur a promis la tête de celui qui les empêche de “bien bouffer.”